La première fois que j'ai observé le vératre vert (Veratrum viride), au Cap Tourmente (Québec), je l'ai pris pour le blanc (Veratrum album) que j'avais appris à reconnaître, enfant, lors de randonnées dans les Alpes. Les deux ont en commun ces grandes feuilles plissées et lustrées, disposées en alternance sur la tige.
Les deux contiennent également un cocktail d'alcaloïdes émétiques (qui font vomir), bradycardisants (qui ralentissent le rythme cardiaque) et hypotenseurs (qui diminuent la pression artérielle), qui les rendent toxiques: jervine, rubijervine, vératramine, protovératrines A et B, et vératrine. L'ingestion de 20 mg de ces substances (l'équivalent d'environ 1 à 2 g de racine) suffit pour s'empoisonner. Les premiers signes de l'intoxication se font sentir 30 minutes à 2 heures après l'ingestion et se traduisent par des nausées, des vomissements et des sueurs froides. Si les vomissements ne permettent pas à l'organisme d'éliminer suffisamment de toxines, alors le cœur ralentit et la tension diminue jusqu'au collapsus. Seule l'administration d'atropine, une molécule d'origine végétale (belladone, jusquiame, datura, mandragore) peut empêcher la mort dans les trois à quatre heures suivant l'ingestion.
En Europe, il faut savoir reconnaître la plante (Veratrum: feuilles alternes, plissées et à nervures parallèles et pour ne pas la confondre avec la gentiane jaune (Gentiana lutea: feuilles plissées et opposées, à nervures parallèles) qui sert à fabriquer des liqueurs apéritives et qui, avant la floraison, lui ressemble comme deux gouttes d'eau. Au Canada, les pousses de Vérâtre vert peuvent être confondues avec l'ail des bois (Allium tricoccum: feuilles lisses à nervures parallèles et à forte odeur d'ail) et le chou puant (Symplocarpus foetidus: feuilles lisses à nervures ramifiées).