Cher Journal,
je t'avais dit que ma mère était née juste après ma soeur. C'est sa fête aujourd'hui. Elle a reçu de la part de mon père un très joli bouquet corail. Des fleurs en janvier, ça fait toujours plaisir. Un beau rappel qu'il existe autre chose que la neige.
Mon moment préféré de ma vie ces temps-ci, c'est pas exactement enlever mes mitaines à -20 pour mettre du Purell gelé devant mon épicerie. On a dû complètement adapter notre fonction hivernale pour y ajouter les barrières sanitaires. Tu nous verrais s'accrocher des masques derrière les oreilles quand on porte une tuque et un foulard, rajoute à ça des lunettes et c'est banco comme disent les autres. Les Français.
J'ai habité à Paris dans un monde qui n'existe plus. Les années 90. J'y ai déménagé quand j'avais 9 ans. Ce qui m'impressionnait le plus à Paris, c'était pas la tour Eiffel, le centre Georges Pompidou ou que c'est carrément un musée à ciel ouvert. Non, ce qui fascinait la petite québécoise que j'étais, c'était qu'il y avait des manèges: dans. la. rue. T'imagines? Des espèces de carrousels un peu cheapo, qu'on retrouvait dans les marchés publics ou à la sortie du métro. Ils étaient déplacés d'un endroit de la ville à l'autre. Une sorte de vague souvenir des foires ou des cirques ambulants, j'imagine. Tu sais le genre qui tourne avec des vaisseaux qui montent et descendent et clignotent et rappelle les toupies colorées qui jouaient la Lambada et étaient vendues (illégalement) sur le parvis de Notre-Dame?
Ces manèges me surprenaient parce qu'en bonne nord-américaine que j'étais, tout ce que j'avais connu comme manèges étaient à La Ronde. Et La Ronde c'était sur une île mystérieuse qui n'était même PAS l'île de Montréal et il fallait convaincre ses parents d'y aller et c'était très compliqué. Tous les manèges avaient été enfermés là, rassemblés en tapon, pas du tout éparpillés dans la ville comme à Paris. Les Parisiens avaient bien compris, eux. La meilleure manière de convaincre un parent de laisser son enfant faire un tour de manège, c'était que le manège vienne à eux! Du génie! On passait devant tous les jours en prenant le métro! Et on le voyait, non pas d'en haut du pont Jacques Cartier, NON, le manège était littéralement devant chez nous! Alors moi et ma soeur, on en faisait des tours et des tours!
Ma mère abitibienne adorait vivre à Paris. On y est restés seulement 5 ans, mais elle qui aime tant les musées, la culture et est dotée d'une curiosité assez infatigable, au bras de mon père français, à sillonner la ville lumière, elle aura été servie.
Bonne fête Maman.